Pro-Am

Pour les médias, les pistes dessinées (confirmées ?) cette semaine, tournent, bien sûr, autour de:

la participation          )

la collaboration         )

l’interaction               )   ————- de l’information.

la personnalisation    )

la présentation          )

la sélection               )


En résumé, vers des
modèles hybrides, associant experts et publics, professionnels et amateurs (pro-am).

Car désormais, évidemment, l’audience a pris la parole

C’est vrai aussi dans la photographie: la chute des prix des équipements de qualité, des coûts de distribution via Internet et l’utilisation de Photoshop ont aussi démocratisé la photo. Il n’y a qu’à regarder Flickr ! Beaucoup de “bruit”, mais beaucoup de clichés sidérants !

Et aujourd’hui, avec l’iPhone le “crowd-sourcing” devient mobile.

Pourquoi les gens participent et partagent? Parce qu’ils aiment ça !

  • Les gens aiment jouer un rôle dans quelque chose de plus important qu’eux-mêmes et partager des infos uniques et récentes (Pete Cashmore, fondateur du site sur les nouveau médias, Mashable)
  • Le partage d’informations est plus facile que celui de biens physiques ou de services et procure une émotion positive (Shirky). “C’est ça qui a tétanisé l’industrie de la musique et qui va complètement transformer celle des médias du 20ème siècle”.


L’heure est donc vraiment à la collaboration pro-am! Travailler ensemble = co-création d’un bien public

“La manière dont CNN couvre l’actualité est aujourd’hui fondamentalement différente d’il y a quatre ans (…) et, désormais, dans certaines situations, on ne peut plus travailler sans les médias sociaux, comme récemment en Haïti ou en Iran”, souligne Lila King, senior producer de iReport de CNN. CNN, qui parle de “participatory story telling”, organise désormais tous les mois des formations pour familiariser ses journalistes à la collaboration avec l’audience.

Sur l’Iran, le New York Times a beaucoup utilisé son blog The Lede, avec du “live blogging”, un news desk 24/7, le recours à Twitter et à des clips de YouTube, aux agences de presse, raconte l’un de ses reporters Robert McKey, ancien “fact checker” de profession et qui exhorte à “un état d’esprit sceptique”.

Pour des faits divers aussi : une fusillade, suivie d’une chasse à l’homme dans l’État de Washington, a été essentiellement couverte fin 2009 via des tweets, l’outil Google Wave et des témoignages du public, souligne Monica Guzman, du premier quotidien US passé en web only SeattlePI.com, (douze reporters, un photographe, trois producteurs). “Toute la ville a coopéré, même le directeur de l’info du Seattle Times twittait (…) “Nous ne prenons jamais un tweet pour une info fiable. Nous vérifions, au besoin en allant sur place et nous n’avons corrigé en tout qu’un seul tweet (…) Rumeurs et fausses infos sont aussi très vite repérées et corrigées par les autres”.

Tout comme sur Wikipedia, qui “ne doit pas être une source mais un point de départ, explique Moka Pantages, de la fondation Wikimedia (trente-quatre personnes pour 100.000 contributeurs!) en prenant pour exemple les attaques à Mumbai fin 2008: un volontaire de l’encyclopédie en ligne a publié le scoop. “Depuis, 1.245 personnes ont contribué à l’article, édité 4.000 fois et riche de 43.000 mots (…) Plus un article est édité, plus il est long, plus il est fiable”.“Le web est un four auto-nettoyant”, reconnait David Carr, le rubricard média du New York Times.

Le blog politique progressiste DailyKos, et ses 30.000 contributeurs, aujourd’hui dans le top 3 des sites d’infos US, bat régulièrement le NYT et les télés US. “Nous pouvons faire tout ce qu’ils font en utilisant le public”, assure péremptoire, son fondateur Markos Moulitsas. Sur leurs passions, les gens écrivent facilement et gratuitement ! Méfions-nous des passions dans l’info ! Et tentons de toujours savoir qui parle.

Certains, comme Spot.us, fondé il y a un an et financé par la Knight Foundation, font le choix de répartir le coût de la rédaction auprès du public appelé à choisir tel ou tel reportage et à participer à son financement. C’est David Cohn, le fondateur qui détermine avec les reporters les angles et les sommes nécessaires (jusqu’à 10.000 $). “Ce n’est plus réservé aux éditeurs: le public aussi peut avoir un budget de pigistes!”, dit-il. “Nous ne remplaçons pas les journaux, mais permettons au public de jouer un rôle dans la couverture de l’actu et d’être en prise avec les journalistes. Trop souvent persiste une vraie déconnexion entre le public et les journalistes dans la perception et l’importance d’un sujet”.

Spot.us, actif à San Francisco et Los Angeles, a déjà vendu des enquêtes au New York Times, et cherche à s’agrandir, mais n’est pas encore rentable. Ses pigistes vont de prix Pulitzer à des localiers.

“Le partage et la collaboration créent dont de la valeur pour leurs auteurs mais aussi de l’utilité publique”, note Shirky.


Confiance, validation, media literacy, curation & détecteur d’âneries:

On l’a vu récemment, Facebook est de plus en plus un point de départ pour aller, via des liens, consommer de l’information sur les sites de news traditionnels. “On part d’une info ou une rumeur envoyées par son réseau et on valide par un média traditionnel (…) Les teenagers deviennent des fans des sites de news”, assure Randi Zuckerberg, responsable marketing de Facebook (et sÅ“ur du fondateur).

Mais dans cette période de production quasi industrielle et indifférenciée de contenus (ContentMedia, AOL Seed, Gawker, …), la valeur, nous l’avons dit souvent ici, se trouve aussi de plus en plus dans le tri, le choix assumé (“curation” en anglais), de sites comme Kottke , A List Apart, Thrillist pour le lifestyle, MyInspirationLounge pour les femmes, Pictory pour la photo, ou toujours le Daily Dish de Andrew Sullivan via le magazine The Atlantic.

Elle se trouve aussi dans le contexte : “la quête d’informations systémiques plutôt qu’épisodiques est de plus en plus forte”, relève Matt Thompson, de la radio publique américaine NPR.

Tri, sélection, validation, sens: “les grandes marques de média restent importantes comme filtres de confiance. des référents dans lesquels on a confiance”, renchérit Cashmore (Mashable). Pour lui, “les gens doivent être plus éduqués sur l’origine des informations : apprendre à savoir à qui faire confiance” dans les vieux, comme dans les nouveaux médias. “L’avantage des blogs c’est qu’ils donnent leurs sources avec des liens (…)Il faut donc avoir un bon détecteur de b/s!”.

“Il faut réconcilier la dynamique sociale du web et les contenus de qualité”, estime Richard Ziade, de la firme web newyorkaise Arc90.

Aujourd’hui, un expert semble donc se définir de plus en plus par la qualité de son réseau que par la profondeur de son savoir. “Reste la question essentielle, résume Shirky : quelle valeur pouvons-nous tirer de ce grand partage civique?”.

Billet initialement publié sur AFP-MediaWatch